LA VRAIE VIE EST-ELLE AILLEURS ?

On connaît la sentence énoncée jadis par Arthur Rimbaud :
« La vraie vie est absente. Nous ne sommes pas au monde ».
Un cri de déception dans un monde marqué par la misère spirituelle du temps, en ce XIXème siècle d’essor industriel, de déracinement paysan, de bigoterie officielle et de répression. Répression des poètes – on se souvient de la condamnation des Fleurs du Mal - , répression de la Commune de Paris et du mouvement ouvrier, dictature de Louis-Napoléon Bonaparte, exil de Victor Hugo… Sombre époque, dira t'on.
Certes, mais la nôtre vaut elle mieux, plongée, depuis la fin des « Trente Glorieuses », dans une crise économique, écologique et sanitaire sans fin ? On peut en douter. Et même remarquer que la numérisation exacerbée du quotidien semble, de plus en plus, transformer les humains en robots. Rimbaud désespéré d’être jamais reconnu, étouffant dans un monde sans esprit, finit par renoncer et se fit – parait-il - trafiquant d’armes.
Toute vie pourtant n'est pas nécessairement une saison en enfer. Et Rimbaud lui-même, après l'avoir trouvée amère, sut apprendre à "saluer la beauté", comme Baudelaire l'avait fait avant lui dans Les fleurs du mal. Il n'y a ni arrière-monde, ni autre monde, et il faut bien convenir, la sagesse venant avec l’âge, que Spinoza avait raison quand il affirmait "par réalité et perfection, j'entends la même chose".
Résultant de l'histoire des siècles, d’inouïs rapports de force et des multiples engrenages de causalité, ce monde est le seul qui pouvait advenir, car c’est lui qui advint.

La vraie vie est dans ce monde, dans le regard porté sur lui, sur sa beauté que nous pouvons déceler, conquérir, ou créer. Aimer la vie, savoir être attentif, disponible et ouvert à l’altérité, prendre confiance en soi : autant d’apprentissages véritablement fondamentaux qu’il nous revient, parents, éducateurs ou enseignant(e)s, de dispenser à nos enfants.